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Intermédiation et marché public d’assurance

La mission consistant « à assister et à conseiller une personne publique afin de lui permettre de passer des marchés publics d’assurance et notamment de sélectionner les candidats dans le respect des dispositions du code des marchés publics » peut être confiée à un avocat dans le cadre d’un marché public.

C’est ce qu’il ressort d’un arrêt du Conseil d’Etat en date du 10 février 2014 (CE, 10 févr. 2014, n° 367262).

En l’espèce, le SDIS du Doubs cherchait à conclure un marché de services « ayant pour objet une mission d’assistance et de conseil pour le montage des dossiers et la passation de marchés d’assurance et une mission d’assistance technique permanente pour toutes les questions relevant notamment de l’assurance des biens, des responsabilités et des personnels du SDIS« .

A l’issue d’une procédure adaptée, le marché avait été attribué à un cabinet d’avocats.

Contestant la validité de ce contrat, un candidat évincé avait introduit un recours. Celui-ci soutenait que les prestations objet du marché entraient dans le champ de l’activité d’intermédiation en assurance -activité réglementée et dont l’exercice est réservé à une certaine catégorie de personnes, dûment habilitées à ce titre, et immatriculées sur un registre unique des intermédiaires (C. ass., art. L. 512-1)- et ne pouvaient par conséquent être valablement confiées à un avocat.

Se posait donc la question suivante: les prestations objet du marché litigieux relevaient-elles de l’activité d’intermédiation en assurance?

Cette activité est définie par le Code des assurances comme « l’activité qui consiste à présenter, proposer ou aider à conclure des contrats d’assurance ou de réassurance ou à réaliser d’autres travaux préparatoires à leur conclusion » (C. ass., art. L. 511-1, al. 1); la présentation, proposition ou aide à la conclusion devant être entendues comme « le fait pour toute personne physique ou personne morale de solliciter ou de recueillir la souscription d’un contrat ou l’adhésion à un tel contrat, ou d’exposer oralement ou par écrit à un souscripteur ou un adhérent éventuel, en vue de cette souscription ou adhésion, les conditions de garantie d’un contrat » (C. ass., art. R 511-1, al. 1) et les travaux préparatoires comme « tous travaux d’analyse et de conseil réalisés par toute personne physique ou personne morale qui présente, propose ou aide à conclure une opération d’assurance » (C. ass., art. R 511-1, al. 2).

La Cour administrative d’appel de Nancy avait considéré que la mission du marché public consistant en une prestation d’assistance et de conseil pour le montage des dossiers et la passation de marchés d’assurance jusqu’à la signature de ceux-ci, entrait dans le champ de la définition de l’intermédiation en assurance, et devait par conséquent être nécessairement confiée à un intermédiaire dûment habilité. La Cour prononçait donc l’annulation du marché public conclu avec le cabinet d’avocats (CAA Nancy, 28 janv. 2013, n° 12NC00126). (La mission d’assistance technique, seconde prestation objet du marché public litigieux, n’avait quant à elle pas été jugée incompatible avec la profession d’avocat)

Le Conseil d’Etat n’a pas partagé l’interprétation de la Cour d’appel, considérant au contraire que « la mission consistant à assister et à conseiller une personne publique afin de lui permettre de passer des marchés publics d’assurance et notamment de sélectionner les candidats dans le respect des dispositions du code des marchés publics n’a pas pour objet de présenter, de proposer ou d’aider à conclure un contrat d’assurance ou de réaliser d’autres travaux préparatoires à sa conclusion« .

N’étant pas constitutive d’une prestation relevant de l’activité d’intermédiation en assurances, la mission d’assistance et de conseil à la passation de marchés publics d’assurance n’est pas réservée aux intermédiaires en assurance et peut, valablement, être confiée à un avocat.

(Publié par RJB Avocats le 22 avril 2014)